CASACCI
Sévérin -
Aix 1941
Homme d'action, de sciences et de coeur, Séverin
Casacci a consacré sa carrière à l'énergie
hydraulique.
Il naît le 19 janvier 1923
à Carqueiranne, près de Toulon. Son père,
ouvrier maçon et sa mère l'accompagnent dans
ses études et s'investissent en lui ; il faut dire
que ses aptitudes sont très tôt remarquées.
Il poursuit ses études au lycée Rouvière
à Toulon, puis à l'Ecole Pratique où
il obtient un brevet industriel. En 1941, il est admis aux
Arts-et-Métiers à Aix-en-Provence où
son surnom, " philo " lui est donné. Son
père décède en 1942, ce qui ne facilite
pas matériellement la poursuite de ses études
et, étant fils unique, il n'est pas boursier. Entré
chez Pechiney en juillet 1944, il est appelé sous
les drapeaux de juillet à décembre 1945 dans
l'aviation comme élève-aspirant.
.On peut dire qu'à partir de 1946 et jusqu'à
sa mort, sa vie va être consacrée presque exclusivement
à l'étude, à l'action professionnelle
et à la réflexion humaniste.
Mathématiques
Le fil conducteur de ses études,
c'est les mathématiques et la rigueur qu'elles imposent.
Il obtient en 1946 les certificats de mathématiques
générales et de mécanique rationnelle.
Son employeur, Neyrpic, où il a été
embauché en 1946, l'autorise à " Préparer
le certificat de calcul différentiel et intégral
ou de mécanique des fluides
sous réserve
de compenser le temps des cours par du travail le samedi
".
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Chez Neyrpic, il prend la tête de
l'équipe de jeunes " Forts en maths " dont fait
partie, entre autres Jacques Bosc (Aix 1950) qui lui succèdera
chez Neyrpic plus tard. Il va approfondir sans cesse sa maîtrise
mathématique en utilisant, comme le dit joliment sa secrétaire,
" des formules à six étages et des équations
dont la somme est toujours zéro ".. S'il est passionné
de mathématiques, ce n'est pas à titre spéculatif
mais pour résoudre des problèmes techniques difficiles
et souvent, à l'époque, traités en partie
à l'intuition, comme les vibrations hydroélastiques
des structures, la mécanique des fluides des turbomachines,
la résistance des structures.
Son parcours professionnel se confond
entièrement avec le développement de Neyrpic pendant
37 ans, où il a été successivement ingénieur
d'études, responsable des études de turbines, ingénieur
en chef, directeur technique, directeur général
adjoint. Il a écrit , seul ou en collaboration, plus de
50 articles et 4 livres techniques.
A la sortie de la guerre, en 1945, Neyrpic était une entreprise
moyenne grenobloise, mais ses dirigeants de l'époque avaient
pressenti le rôle qu'elle pourrait jouer dans la reconstruction
et le développement de ce pays ravagé qu'était
la France. Ils embauchèrent de jeunes scientifiques, Séverin
Casacci étant l'un de ceux-là..
Publication d'études
Ses premiers articles sur la pivoterie, les paliers et les frottements
fluides des machines tournantes, paraissent en 1948 dans la Revue
de la Houille blanche et le bulletin de la Société
française des Electriciens. Il dépose avec deux
autres cadres, la même année, un premier brevet sur
la pivoterie. Même s'il s'est intéressé à
des améliorations dans des domaines divers, ses études
ont porté, dès lors sur les turbines de basses chutes
et, en particulier sur les groupes-bulbes. L'idée ne lui
appartient pas mais il a réalisé le premier prototype
de ces bulbes à Castet. Avec Paul Jarriand (Cl 1945), il
conduit les études de quatre autres groupes expérimentaux
réalisés entre 1953 et 1956.
Entre 1954 et 1962, il est responsable des études Turbines
et Régulation. A ce titre, douze articles paraissent sur
la flexion des coques et l'équipement des basses chutes.
Sa compétence est maintenant reconnue en France et à
l'étranger où il donne des conférences, en
particulier à Moscou et aux Etats-Unis. Il présente
sa thèse d'ingénieur docteur en 1960 et commence
à donner des cours de mécanique à l'Institut
de Mathématique Appliquée de Grenoble.
De 1963 à 1973, il est Ingénieur en chef de Neyrpic,
division Energie d'Alsthom et aborde la technique difficile des
turbines-pompes en coopération avec l'entreprise Bergeron,
créée par Louis Bergeron.
Les réalisations commencent avec l'usine marée-motrice
de la Rance et Pierre-Bénite qui a été le
point de départ de toute une génération d'usines.

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En 1966, il soutient sa thèse
de Doctorat d'Etat es Sciences sur " La flexion des
coques minces ". Il fait paraître, une vingtaine
d'articles sur les études de turbines.
De 1974 à 1983, il est Directeur Scientifique et
Technique de Neyrpic, au sein de Creusot-Loire et comme
tel, il est amené à gérer les conséquences
du choc pétrolier de 1973. Grâce à son
niveau scientifique et technologique, Neyrpic résiste
et reste dans les années 80, la seule société
active dans son domaine. Une vingtaine de brevets sont déposés,
Neyrpic et Séverin Casacci étant reconnus
dans le monde entier et classés parmi les meilleurs
mondiaux. A ce titre, des réalisations prestigieuses
sont à signaler : l'usine d'Itaïpu au Brésil
avec des turbines de 750 MW, taille jamais réalisée
jusque là et la centrale de Love, aux Etats-Unis,
construite et complètement équipée
à St Nazaire, transportée par flottaison à
travers l'Atlantique, remontant le Mississipi et l'Ohio
pour y être installée.
Ce parcours illustre les qualités
de Séverin Casacci, l'intelligence des choses, la
faculté de synthèse, la capacité à
traiter les problèmes par le haut à partir
d'un concept général, la rigueur scientifique.
Il faisait partie de ces rares Ingénieurs qui sont
capables de trouver un juste équilibre entre les
spéculations scientifiques et les réalisations
dans l'action. Ce parcours met en relief aussi sa puissance
de travail, son dynamisme, sa tension permanente vers un
but, en un mot, sa passion.
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Curieux et cultivé
On pourrait le croire complètement immergé dans
ses études théoriques, ses réalisations industrielles,
son enseignement à l'Université de Grenoble et sa
participation à la création du Centre de Recherche
et d'Essais de Machines Hydraulique de Grenoble, aussi est-on
surpris de découvrir un homme dont les centres d'intérêt
étaient multiples .
On a dit que ses facultés d'assimilation et sa curiosité
toujours en éveil lui avaient ouvert bien d'autres champs
de connaissances, un peu à la manière des humanistes
de la Renaissance. Il était passionné de musique,
féru de littérature, érudit en histoire dans
laquelle il marquait un intérêt particulier pour
l'antiquité méditerranéenne. " Attiré
par toutes les civilisations du globe, depuis les Etrusques jusqu'aux
Mayas, il revenait naturellement à ses ancêtres grecs
et latins qui ont tant marqué sa Provence natale. "
Grand voyageur, sa pratique de quatre langues européennes,
avec des notions de russe, lui facilitait les contacts et les
négociations parfois difficiles qu'il avait à mener.
Ce parcours éblouissant était
celui d'un homme qui, par son exemple, par sa facilité
de communication et par la passion qu'il mettait en toute chose,
savait entraîner les hommes. Ses collaborateurs avaient
confiance en lui, sachant qu'il assumait et que l'on pouvait compter
sur lui au plan technique et humain, dans les moments difficiles.
Sa vie familiale est un élément important de son
parcours. Renée Tétaz, aixoise, et Séverin
se sont mariés en 1944 et leur premier enfant est décédé
en bas âge, resserrant encore leurs liens. Il s eurent quatre
autres enfants et son épouse a su le comprendre et l'aider
en créant le climat familial qui lui a permis de pousser
à sa limite l'exploitation des dons qu'il avait reçus.
Si sa vie d'étude et d'engagements techniques, ses absences
nombreuses, n'ont pas permis une présence continuelle,
il restait très proche de sa famille par ailleurs admirative
de ce qu'il accomplissait.
Il est décédé le 4
juin 1983 et est inhumé à Meylan.

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Distinctions :
- Prix Oppenheim par la Société d'Encouragement
pour l'Industrie Nationale le 15 octobre 1981
- Officier dans l'Ordre National du Mérite le 21 janvier
1982
- Prix Nessim Habif par la Société des Ingénieurs
Arts et métiers le 28 juin 1984 |
Edmond DE ANDREA - Aix 45
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