COUZINET René - Angers 1921

Né le 20-07-1904 à Saint-Martin-des-Noyers, décédé le 16-12-1956.


"En octobre 1921, il entre à l'Ecole d'Angers. Dès l'année suivante, à 18 ans, il dépose plusieurs brevets relatifs à l'aviation. Sorti second de sa promotion en juillet 1924, il poursuit ses études à l'Ecole Supérieure d'Aéronautique puis est incorporé en novembre 1925 dans l'Armée de l'Air où il devient sous-lieutenant.

Un jeune inventeur

o Le 8 mai 1927, Nungesser et Coli décollent du Bourget pour traverser l'Atlantique. On ne les reverra plus. Treize jours plus tard, le 21 mai, au milieu d'une foule enthousiaste, l'officier de service René Couzinet très impressionné accueille Lindbergh qui vient de réussir la traversée New York-Paris. René Couzinet a un projet d'avion commercial transatlantique, un trimoteur, très en avance pour son époque. Son enthousiasme est communicatif et grâce à de nombreux appuis, il peut trois semaines plus tard commencer la construction de l'avion.


o Mars 1928 : L'Arc-en-Ciel est présenté à la presse. C'est un avion complètement nouveau, aussi bien par sa silhouette que par ses aspects techniques : monoplan à ailes épaisses, trimoteur (les moteurs étant accessibles et réparables en vol), il a un rayon d'action de 10 000 Km, peut voler à 260 Km/heure..
Malgré un refus d'autorisation de vol pour non conformité aux normes officielles (100 Kg/m2 au lieu de 50), les essais se déroulent parfaitement. Pourtant en août, une manoeuvre trop risquée conduit à l'accident. Il faut reconstruire le prototype. Mais avec quels fonds ? La ville de Biarritz prend l'initiative de lancer une souscription, l'élan est donné, les soutiens affluent.

o 1929-1930 : Période très créatrice pour René Couzinet qui dépose brevet sur brevet. En février 1930, dans l'usine Letord de Meudon il construit trois trimoteurs postaux, l'Arc-en-Ciel, un hydroglisseur. Mais le 17 février le feu détruit tout.

II faut, à nouveau tout recommencer, les soutiens se manifestent une fois de plus. René Couzinet s'installe à l'île de la Jatte (Levallois-Perret), il construit un Couzinet postal (type 20) puis le Biarritz qui sort d'usine le 6 octobre 1931.

Vers le succès

Le BIARRITZ réussit la première liaison aérienne France/Nouvelle-Calédonie. Il décolle du Bourget le 6mars 1932, avec De Verneilh, pilote, Devé, navigateur et Munch, mécanicien. Istres, Tripoli, Le Caire, Bassorah, Guvadar, Karachi, Allahabad...les escales se succèdent, et le 5 avril, le Biarritz atterrit en Nouvelle-Calédonie, accueilli par 10 000 personnes enthousiastes.

Au début de 1932, le troisième arc-en-ciel sort d'usine. Une fois encore beaucoup d'innovations : 30 mètres d'envergure, trois moteurs de 650 CV chacun, un rayon d'action de 11 000 Km, vitesse maximum : 285 Km/heure.

L'avion intéresse l'Aéropostale pour l'Atlantique Sud. La concurrence est rude alors pour assurer la traversée régulière. En Amérique du Sud d'une part, entre le Sénégal et l'Europe d'autre part, des réseaux sont constitués. Mais pour traverser l'Atlantique Sud on doit encore utiliser le bateau. Quel moyen choisir pour mettre en place une liaison aérienne : le dirigeable ? l'hydravion ? l'avion ?.
L'Aéropostale est séduite par les innovations de Couzinet. Elle lui fait rencontrer Mermoz. Les deux hommes sont habités de la même passion et deviennent aussitôt amis.

" Ces deux hommes avaient le même idéal, le même désintéressement, la même pureté, la même passion sacrée, ils se complétaient pour une grande tâche. Contre la paresse des bureaux, les combinaisons d'antichambre, contre la cupidité, i'envie et ia peur. Us formèrent attelage. Ce n'était pas trop de leurs deux génies con)ugués. Sans Couzinet, Mermoz eût erré longtemps dans les défifés du désespoir. Sans Mermoz, Couzinet n'eût pas vu l'Arc-en-Ciel triompher ". (Joseph Kessel : Mermoz, Gallimard, 1938).

Mais il faut, pour convaincre définitivement l'Aéropostale, effectuer un voyage de démonstration, relier Paris à Buenos-Aires. Malgré les obstacles et les difficultés créés par les services officiels, l'Arc-en-Ciel décolle du Bourget le 7 janvier 1933, direction Istres puis l'Afrique et le Brésil. (...) Escale à Port-Etienne (Mauritanie) puis à Saint-Louis du Sénégal. Et c'est la traversée de l'Atlantique. Entre Saint-Louis et Natal au Brésil : 3 173 Km parcourus en 14 h 32 de vol à 227 Km/heure de moyenne. A Natal, puis Rio, Buenos-ATres, Montevideo, l'accueil est triomphal. Les télégrammes de félicitations affluent, la presse salue l'événement. Réceptions, fêtes, banquets. C'est un exploit : Le Bourget/Buenos-Aires soit 13 045 Km parcourus en 57 h 56 minutes de vol, moyenne horaire 225 Km.

Le triomphe

Le 15 mai c'est le retour. L'Arc-en-Ciel décolle de Natal au Brésil, direction Dakar. Un journaliste est à bord, il fait le récit d'un vol qui se termine dans l'inquiétude. Environ 1 000 Km avant Dakar une fuite d'eau est décelée. Celle-ci s'aggrave rapidement, il faut stopper un moteur, l'avion descend, les températures de l'eau et de l'huile dépassent nettement la cote d'alerte. Il fait 45° à l'intérieur de l'avion, l'eau atteint 92° et l'huile 97°. Tous les navires sont en état d'alerte, les radios veillent, prêts à aider l'Arc-en-Ciel. L'angoisse règne. Vont-ils arriver ? Mermoz et l'équipage utilisent tous les moyens disponibles et à 20 h 10 l'Arc-en-Ciel se pose enfin à Dakar. Soulagement et joie de la population qui a suivi, avec anxiété, les dernières heures de vol.

Le 21 mai, l'arrivée au Bourget est triomphale, 15 000 personnes acclament Mermoz, Couzinet et tout l'équipage. L'Arc-en-Ciel est le premier avion à avoir réussi la double traversée de l'Atlantique Sud. C'est une victoire pleine de promesses pour l'aviation française.

Des temps difficiles

Pourtant il faut vite déchanter. L'Aéropostale, en butte à de nombreuses hostilités, est mise en liquidation puis absorbée par la nouvelle compagnie nationale : Air France. L'Arc-en-Ciel a beau effectuer avec succès plu- sieurs traversées de l'Atlantique Sud en 1934, aucune commande officielle ne se concrétise malgré les promesses. "
Depuis des années, écrit un journal de l'époque, on couvre de fleurs René Couzinet, on le porte aux nues dans les discours officiels et systématiquement on le torpille chaque fois qu'une commande doit lui être passée ".
Et fin 1934, l'usine doit fermer ses portes faute de travail. René Couzinet pourtant ne se décourage pas, il prépare toujours de nouveaux projets comme celui du Guanabara. Dans un hangar aménagé au Bourget, il travaille dans des conditions difficiles, avec le soutien constant de Mermoz. Mais celui-ci disparaît avec "La Croix du Sud" le 7 décembre 1936. Couzinet crée alors une nouvelle société : la TRANSOCEANIC. En 1937, il construit un bi-moteur : le Couzinet 10.

En même temps, il se lance dans l'entretien et les réparations d'appareils militaires, et le ler octobre 1938, il obtient l'accord du ministère de la défense nationale pour installer une partie de ses ateliers près du terrain d'aviation en construction à La Roche- sur-Yon. Dans l'usine achevée en décembre 1939, on répare des "Potez 540", des Caudron "Goéland", et on prépare la construction d'avions de chasse Arsenal VG 90. A la fin de 1939 on travaille également à un prototype dans le garage Citroën de la place Napoléon. Au début de 1939 le constructeur reçoit une commande officielle pour un Couzinet B 4 (quadrimoteur de bombardement) qui pourra atteindre 510 Km/heure.

Puis la guerre est déclarée. Comme les commandes s'accélèrent, Couzinet envisage une nouvelle implantation à Barbâtre dans l'île de Noirmoutier. Mais tout cela vient trop tard. Après l'offensive allemande, les entreprises Couzinet se replient vers le sud. Et le 20 septembre 1940, René Couzinet gagne le Brésil. Directeur de la Fabrique Nationale d'Avions du Brésil à Lagoa Santa, il s'engage en septembre 1943 dans les Forces Françaises Libres.

1944, retour en France. Malgré les difficultés administratives (pour récupérer l'usine de Levallois-Perret occupée par les allemands, réparer les ateliers de La Roche-sur-Yon en partie détruits par deux bombes en juin 1944), René Couzinet reste toujours aussi inventif.

Il crée des avions transatlantiques (un quadri- moteur postal par exemple), des hydravions, mais aussi des avions de tourisme (biplace, quadriplace...). Mais il s'investit alors surtout dans les hydroglisseurs.

Le 27 septembre 1946, dans la baie de Rio de Janeiro, il lance l'hydroglisseur 125. De retour en France il construit plusieurs modèles. Ainsi l'hydroglisseur type 60 mû par un petit réacteur Turbomeca présenté au salon de l'aviation en 1951 . C'est le premier "bateau à réaction" construit en France. Pourtant, malgré toutes ces inovations, les difficultés persistent. Il n'y a pas de commandes pour les hydroglisseurs.

Le 16 décembre 1956, épuisé par les difficultés qui s'accumulent, il disparaît.


La ville de la Roche-sur-Yon a consacré un très bel espace permanent à René Couzinet rendant ainsi hommage à cet homme d'exception.

Source : Document de la "Maison Renaissance" - La Roche-sur-Yon

> En savoir plus :
Couzinet (A) : Mermoz-Couzinet ou le rêve fracassé de l'Aéropostale. Paris . Picollec 1986
Fonds René Couzinet : Archives Municipales de La Roche-sur-Yon.


> Sur le web :
http://petitefabrique.free.fr/couzi/index.html
http://aerostories.free.fr/couzinet/


> Article extrait de Arts et Métiers Magazine d'avril 2002

 
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